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Du laboratoire à la plage

Un chercheur de l'École des sciences biomédicales de l’Université 51³Ô¹ÏÍødécouvre un moyen pour les voyageurs, les plongeurs et les familles de soulager les piqûres venimeuses

Alors que de nombreux Canadiens troquent la pelle contre la planche de surf pendant les vacances de Noël, rares sont ceux qui pensent aux douloureuses surprises que peuvent réserver des vacances à la plage. Les méduses, les coraux de feu et les poissons-lions envahissants peuvent transformer une baignade par un après-midi ensoleillé en une urgence médicale et causer des douleurs si intenses que l’on doive écourter son voyage.

Voilà ce qui a conduitÌýReza Sharif-Naeini, chercheur dans le domaine de la douleur à l’UniversitéÌýMcGill, à créerÌý, une crème topique qu’utilisent les plongeurs et les amateurs de plage du monde entier pour traiter les piqûres potentiellement invalidantes.

Cette avancée ne faisait pas partie de son programme de recherche. Tout a commencé dans un avion.

«ÌýJe feuilletais un magazine de bord et je suis tombé sur un article sur le poisson-lion, raconte RezaÌýSharif-Naeini. Ce poisson possède des épines remplies d’un venin qui provoque une douleur atroce.Ìý»

«ÌýLa piqûre ne tue pas les plongeurs et les pêcheurs, ajoute-t-il, mais elle est si vive que la mort vous semble plus douceÌý».

L’article avait piqué sa curiosité…

«ÌýDe retour au laboratoire de Montréal, j’ai parcouru la littérature, mais je n’ai trouvé personne qui s’était intéressé à la douleur causée par ce venin. Alors, je me suis dit que j’allais tenter de trouver une solutionÌý», se souvient-il.

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Quand la curiosité porte des fruits

Directeur du Centre Alan-Edwards de recherche sur la douleur, Reza Sharif-Naeini possède une expérience dans le domaine de la transmission de la douleur, ce qui lui a facilité la tâche. Il avait déjà travaillé à San Francisco avec un chercheur spécialisé dans les toxines et les venins, notamment celui du serpent corail du Texas. Quelques semaines après son retour à Montréal, il s’est procuré des poissons-lions dans des animaleries, a dilué leur venin et a commencé à le tester sur des neurones.

Les résultats ont été immédiats. Le venin a activé un type précis de fibres nerveuses et a produit des signaux de douleur puissants et persistants. Les plongeurs ont dit à Reza Sharif-Naeini que le seul traitement connu était l’immersion dans de l’eau très chaude.

«ÌýIls plongent la partie du corps qui a été piquée dans de l’eau aussi chaude que possible, la retirent après quelques secondes, puis répètent la séquence pendant une heure, explique-t-il. Ils parviennent ainsi à réduire la douleur d’environ 20Ìý%.Ìý»

Après avoir trouvé une molécule synthétique qui bloquait l’effet du venin, l’équipe de Reza Sharif-Naeini s’est heurtée à un obstacleÌý: la molécule était la propriété d’une grande société pharmaceutique, qui refusait d’autoriser son utilisation.

«ÌýJ’étais déçu, dit-il. Plein de gens se font piquer et on nous empêchait de leur fournir une solution.Ìý»

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La mise au point d’une solution

Reza Sharif-Naeini a poursuivi ses recherches. Il a finalement trouvé un bloqueur similaire présent naturellement dans un extrait végétal, ce qui lui a permis de mettre au point une crème topique en évitant le processus long et coûteux des essais cliniques, exigé pour les médicaments synthétiques.

Les investisseurs ont encouragé ses efforts, mais ont refusé de s’engager financièrement.

«ÌýIls ont dit que le marché était trop petit, car il n’y a que 10Ìý000 à 20Ìý000Ìýpiqûres de poissons-lions par anÌý», se rappelle Reza Sharif-Naeini.

Il a alors décidé de démarrer un projet lui-même.

«ÌýNous avons emprunté de l’argent, obtenu une ligne de crédit et fait tout ce qu’il fallait pour déposer une demande de brevet et enregistrer la société, dit-il. En moins d’un an, nous avions trouvé un fabricant et un distributeur.Ìý»

Cependant, avant de commercialiser le produit, l’équipe voulait une preuve directe de son efficacité.

Qu’ont fait Reza Sharif-Naeini et son étudiant? Ils se sont injecté du venin dilué.

«ÌýLa douleur atteint un niveau de huit ou neuf sur dix en deux secondes, explique-t-il en riant. Tant que vous ne la traitez pas, elle ne disparaît pas.Ìý»

Au bout de cinq minutes, ils ont appliqué la crème.

«ÌýEn trois ou quatre minutes, le niveau de la douleur est tombé à quatre.Ìý»

Ils ont répété le test, en se piquant même avec des épines de poissons-lions vivants, et ont obtenu les mêmes résultats.

«ÌýNous avons pu montrer que nous étions capables de reprendre nos activités normales en moins d’une heureÌý», souligne Reza Sharif-Naeini. Pour les plongeurs, une piqûre ne signifierait plus une journée gâchée, mais un simple contretemps.

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Au-delà du poisson-lion

Une fois la crème mise en marché, une chose inattendue s’est produiteÌý: les plongeurs ont remarqué qu’elle avait d’autres effets.

«ÌýLes gens ont commencé à nous contacter pour nous dire que notre crème agissait encore plus rapidement sur les piqûres de médusesÌý», raconte Reza Sharif-Naeini. D’autres ont affirmé qu’elle soulageait les piqûres d’oursins et de coraux de feu, ou même les piqûres de guêpes et d’abeilles, ou qu’elle apaisait les démangeaisons causées par les piqûres de moustiques et de mouches noires.

Du point de vue du mécanisme d’action, leurs dires avaient du sens. De nombreux venins activent la même voie nociceptive, et la crème bloque cette voie. Ce qui était au départ un produit spécialisé calmant les brûlures de poissons-lions est devenu un traitement polyvalent contre les piqûres à l’usage des voyageurs et des familles.

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Une réussite de l’Université McGill

Pour Reza Sharif-Naeini, cette expérience montre que la recherche menée à 51³Ô¹ÏÍøpeut avoir des répercussions dans le monde entier.

«ÌýL’Université se réjouit qu’une trouvaille faite en laboratoire soulage concrètement les personnes qui se font piquerÌý», conclut-il.

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